Le 2 octobre dernier se tenait la deuxième session de l’Adobe Digital Publishing Summit à Paris, journée fort intéressante de témoignages d’utilisateurs et de présentations autour d’Adobe DPS (Digital Publishing Suite). Evolution notable par rapport à la première édition de l’année dernière, il y avait cette année beaucoup plus de retours d’expérience et beaucoup moins d’évangélisation pure autour du sujet, ce qui témoigne de l’intérêt croissant des annonceurs pour ces solutions de publication digitale, même si les acteurs du secteur ont encore fort à faire en matière d’évangélisation quand même !
En voici un compte-rendu en 7 parties :
1. Points-clés de la journée, perspective de Forrester (ci-dessous)
2. Retour d’expérience presse : Le Point
3. Retour d’expérience annonceur BtoC : Renault
4. Retour d’expérience BtoB : Rémy Cointreau
5. Retour d’expérience BtoB : Airbus
6. Retour d’expérience distributeur BtoC : Conforama
7. Focus Adobe : évolutions DPS et focus analytics
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Synthèse de la journée : Points-clés à retenir
– L’explosion des tablettes se confirme, avec des usages qui s’affinent. Une exploitation spécifique des tablettes s’avère de plus en plus nécessaire, avec un rôle complémentaire aux autres outils au sein d’une stratégie digitale/multi-canal et d’un écosystème de contenus.
– Un décalage encore fort entre les discours et les actes des entreprises en matière de marketing mobile, alors que les usages des consommateurs sont avérés. L’équipement en tablettes des équipes commerciales est la première pierre de l’édifice (Rémy Cointreau, Airbus).
– Des prises de position fortes prises par certains annonceurs : Zéro papier chez Airbus pour les salons depuis 2012.
– Une nécessaire conquête de l’audience qui ne s’impose pas en BtoC, et qui va nécessiter des moyens et du temps.
– Un marketing de l’offre qui favorise la force de proposition des annonceurs, à condition qu’ils sachent se mettre dans cette perspective.
FORRESTER: Comment intégrer les Apps dans le marketing digital
Intervention de Thomas Husson, VP, Principal Analyst
Le mobile a fondamentalement changé nos attentes en tant que consommateurs :
Au-delà des appareils, ce sont les contenus et l’écosystème associé qui sont en jeu. Pour illustrer ce propos, Thomas Husson rappelle quelques chiffres en démarrage de son intervention:
– 1 milliard d’appareils Android activés et bientôt 700 millions d’appareils iOS vendus depuis janvier 2007
– Plus de 820 millions d’utilisateurs Facebook actifs mensuels sur mobile
– 20 milliards de $ de revenus prévisionnels via le mobile pour Ebay en 2013
De manière encore plus impactante que les chiffres, 2 photos de la place Saint-Marc au Vatican prises à quelques années d’intervalle rendent tangible ce phénomène : une première photo lors du décès de Jean-Paul II, une seconde récemment lors de l’investiture du pape François. Sur la première, un téléphone mobile basique et esseulé apparaît dans un coin de la photo, sur la seconde, c’est littéralement une fête des lumières téléphoniques sans parler des tablettes…
Cette appropriation massive du mobile par les consommateurs montre la hauteur des enjeux pour les entreprises : être capables de délivrer leurs services sur n’importe quel appareil, à n’importe quel moment. Sur le marché français, le mobile devient un vrai hub digital, à partir duquel les consommateurs naviguent sur Internet, téléchargent et utilisent des applications, consultent leurs emails, prennent et envoient des photos, des SMS, utilisent un moteur de recherche, leurs réseaux sociaux…
Les usages liés aux applications se diversifient également :
Les tablettes ne sont pas vraiment des appareils mobiles :
Leur premier usage est dans le salon, suivi de la chambre à coucher et de la cuisine ! Même les nouvelles tablettes, plus petites telles que l’iPad mini, ne dérogent pas à cette utilisation pas vraiment mobile : ils sont utilisés en « mobilité statique », dans des cafés, des aéroports, des trains…
Ce qui permet de voir des usages spécifiquement associés aux tablettes se développer, même s’il y a encore un fort recouvrement des usages entre tablettes et autres appareils, en particulier l’ordinateur : consommation de médias et de contenus en ligne, email, navigation et « lazy Internet », c’est-à-dire une navigation de détente sans recherche précise d’information associée. La tablette a aussi un usage fortement social, servant de second écran devant la télévision. La préparation d’achat et l’achat en ligne sont également des usages populaires des tablettes.
Forrester mise sur une divergence encore plus importante à venir des cas d’usage des tablettes par rapport aux autres appareils, notamment avec le développement des objets et de la maison connectés ; différenciation des usages qui multiplierait les opportunités et les scénarios possibles pour les entreprises.
L’intérêt du mobile est sa capacité à connecter le digital et le réel :
Les nouveaux appareils mobiles intègrent des capteurs embarqués qui permettent de suivre le comportement des consommateurs à une échelle nouvelle. Thomas Husson cite par exemple le Samsung Galaxy S4 qui embarque 14 capteurs (allant de la captation du taux d’humidité à …).
En intégrant à la fois les usages et les capacités des appareils, une entreprise peut développer une offre de services et de contenus ciblés et personnalisés à ses clients, adaptés à chaque besoin/étape de leur parcours d’achat. Pour illustration, l’usage d’une application mobile telle qu’elle pourrait être faite par une compagnie aérienne :
Les marques sont encore à la peine dans leur stratégie mobile, négligeant les tablettes en tant que canal spécifique:
Seuls 27% des responsables marketing interrogés par Forrester ont une stratégie mobile depuis plus de 2 ans. Trop nombreux sont encore ceux qui mettent mobile et tablette dans le même panier, ce qui est une erreur pour Forrester. Preuve en est : le trafic sur mobile explose, mais les taux de conversion sont bas, la stratégie mobile n’étant pas une priorité stratégique dans les faits, et la plupart des responsables marketing ne mesurant pas leurs objectifs sur mobile (et ne les définissant même pas au départ !).
Forrester recommande un changement d’optique pour développer les meilleures pratiques sur mobile, en associant les 3 éléments spécifiques au mobile dans une réflexion propre à ce canal :
– L’intimité, associée aux contenus personnels qui y sont (ce n’est pas un appareil qu’on partage facilement)
– L’immédiateté, associée aux tâches et applications utilitaires que le mobile permet de réaliser
– Le contexte, qui peut être déterminé par les capteurs embarqués (GPS, WiFi, NFC, etc.)
Adopter une telle réflexion suppose en conséquence de développer des applications différentes pour tablettes et pour smartphones : l’application tablette privilégiant l’immersion et l’expérience utilisateur d’une marque donnée, alors que l’application smartphone aurait plutôt tendance à favoriser les tâches utilitaires…
De nouvelles opportunités naissent ainsi pour les entreprises : certaines marques utilisent leurs applications sur tablettes pour créer des opportunités de marketing direct, telles Air France avec son magazine digital. D’autres comme Amazon créent de nouveaux benchmarks de support client et de SAV, avec le nouveau service Mayday sur Kindle. Forrester cite aussi deux autres best practices, Fab en matière de design et l’appli de Jamie Oliver en matière d’intégration des vidéos pour illustrer les recettes.
Ne pas se perdre dans les débats technologiques, créer un partenariat avec l’IT :
En conclusion, Thomas Husson insiste sur l’importance de ne pas se perdre dans les débats portant sur les technologies, avant de poser les objectifs et de définir l’audience ciblée. Ce sont ces derniers, une fois définis et clarifiés, qui éclaireront les choix technologiques, et pas l’inverse.
Les décideurs et responsables marketing doivent faire des choix, hiérarchiser leurs priorités et quantifier les objectifs associés, pour pouvoir progresser dans leur stratégie mobile et digitale. D’après les études de Forrester, les priorités associées au mobile semblent être la fidélisation en premier lieu, suivie d’objectifs de transformation commerciale.
Enfin, le design d’une application n’est que la partie émergée de l’iceberg ; la partie immergée, beaucoup plus conséquente, nécessite un partenariat avec les équipes informatiques, la collaboration entre les différents corps de métier étant une condition nécessaire au succès dans l’univers digital 360° et multi-canal qui est devenu le nôtre.