De nombreuses PME et start-ups sont au départ des entreprises unipersonnelles qui se construisent sur l’offre et le savoir-faire initiaux du dirigeant fondateur. Mais quand l’entreprise est confrontée à une crise de croissance, se pose souvent la question de la bonne direction à prendre, en particulier dans l’univers des services : comment choisir?
J’ai vu ce problème se poser à de nombreux chefs d’entreprise, dans les études, les services informatiques, les agences de communication… Ayant été amenée à réfléchir avec certains sur ces sujets, voici une méthode d’aide à la décision simple mais efficace, et qui peut s’appliquer à de nombreux cas d’indécision stratégique.
Il s’agit de la pêche à la ligne.
L’idée est très simple : quand on n’a pas de vision claire de son avenir, ni de conviction arrêtée sur la bonne piste à développer, il faut tendre un maximum de lignes, comme à la pêche, et voir ce qui mord :
- Que savez-vous bien faire ? (Votre savoir-faire actuel, vos forces et expertises)
- Qu’aimeriez-vous faire ? (Vos croyances, convictions et envies)
- Que pourriez-vous faire ? (Avez-vous exploré toutes les pistes ?)
1. Que savez-vous bien faire ?
Il y a différentes manières d’identifier ses forces et expertises, et croiser plusieurs approches est l’idéal car l’image d’une entreprise est rarement monolithique, selon les aléas des collaborations avec les clients.
Quelques pistes d’exploration :
- Pour quelles problématiques êtes-vous consultés le plus souvent ?
- Quel type d’appels d’offres gagnez-vous le plus fréquemment, pour quelles raisons ?
- D’où viennent les sollicitations spontanées, à quel propos ?
- Faites une enquête de satisfaction clients
- Où/sur quels postes gagnez-vous de l’argent, où en perdez-vous ?
- Quelle est la fidélité de votre clientèle ?
- Sur quels sujets prenez-vous la parole en public, dans les médias… ou pourriez-vous la prendre ? Si vous deviez tenir un blog ou publier des articles, sur quels sujets aimeriez-vous vous exprimer ?
Il est fondamental d’être bien convaincu de ses forces et de ses expertises, car dans le doute, c’est souvent en repartant de soi et de ce qu’on sait bien faire que les pistes s’éclairent. Impliquez votre équipe à votre démarche, car c’est d’une conviction partagée que naît la force de l’entreprise. De nombreux dirigeants, en voulant éviter ce travail conjoint et collaboratif, ne font qu’entretenir leurs convictions personnelles erronées qui peuvent entraîner l’entreprise sur de mauvaises pistes.
2. Qu’aimeriez-vous faire ?
Les croyances, convictions ou envies, quand elles sont fermes, sont de vrais moteurs de développement. Le problème est qu’elles sont souvent « en flottement », dans l’atmosphère : elles sont formulées dans les discussions informelles, mais quand la réflexion est rationalisée, elles sont rangées au même niveau que les autres arguments, voire pas vraiment argumentées. C’est une situation qui inhibe l’action, sans aider à la décision. Les convictions et les envies, il faut les tester et s’y confronter, pour valider la piste ou l’éliminer tout simplement.
Quelques manières de le faire :
- Formalisez des offres différentes, et testez-les auprès de différentes cibles (des échanges verbaux avec quelques interlocuteurs peuvent suffire dans un premier temps)
- Elaborez plusieurs sujets de conférences et d’intervention, et proposez-les à diverses audiences
- Testez des partenariats commerciaux avec différents types de structures, qui correspondent aux différentes pistes envisagées
- Laissez vos collaborateurs motivés et volontaires initier des projets de leur propre chef ; il n’y a pas que l’envie ou la croyance des dirigeants qui sera créatrice de valeur, bien au contraire, et les bonnes pistes peuvent émerger de n’importe où.
3. Que pourriez-vous faire ? (Avez-vous exploré toutes les pistes possibles ?)
Dans le doute, si l’envie et/ou le savoir-faire ne suffisent pas à identifier un chemin porteur, il faut se forcer à adopter un point de vue plus large, sortir de sa zone de confort et de jeu habituelle pour explorer le marché.
Pour bien le faire et se donner les chances d’identifier de nouvelles opportunités, il faut le faire en partant du point de vue du client/prospect potentiel, pas de son point de vue de dirigeant. Et partir du point de vue du client, cela signifie se mettre à sa place, comprendre ses enjeux à lui, les problèmes qu’il doit régler, et les différentes options qu’il a pour le faire (pas uniquement celles couvertes par votre entreprise actuellement !). Facile à dire, très difficile à faire pour de nombreux patrons !
Quelques manières possibles :
- Essayer de mener ce genre d’entretien exploratoire avec des connaissances dans un premier temps, pas des clients : pour ne pas y mettre d’enjeu et ramener tout de suite à soi
- S’intéresser aux problèmes des autres, en participant à des clubs de dirigeants, en allant à des conférences thématiques
- Demander à d’autres patrons, dans des métiers tout à fait différents, comment ils ont résolu un problème similaire
- Faites faire ces entretiens avec vos clients ou prospects par d’autres !
Si vous tendez bien toutes vos lignes, vous serez obligé de creuser à la fois profondément en vous-même et dans les capacités de votre entreprise, et de prendre une distance salutaire même si difficile : une bonne gymnastique pour une reprise de croissance saine !